Déliciosité

 

Hier matin, j’ai, comme tous les matins, traversé un bout de Paris à vélo, depuis le boulevard Saint-Michel jusqu’aux alentours de l’Etoile, un Paris qui, ce matin là, comme c’est souvent le cas en ces journées de fin de printemps ou de début d’été, était superbe, léger et délicieux.

Rue Garancière, je me suis fait la réflexion de ce que le petit dôme de Saint-Sulpice, qui ferme le derrière de l’église, était beau dans sa simplicité : un mamelon de sein offrant sa douce rondeur au ciel.

Rue de Grenelle, les affiches pour les élections législatives s’étiraient le long des écoles. L’une d’elles me fit sourire. On y voyait un candidat dont j’ai oublié le nom et qui précisait, sur un large bandeau barrant la photo, qu’il était un petit cousin du Général de Gaulle. Il est étrange et un peu triste, me disais-je, de se définir ainsi.

Continuant mon chemin, j’ai croisé la rue de Bellechasse, au coeur du VIIème arrondissement. Je me suis souvenu de ce camarade d’hypokhâgne ou de khâgne, de la soeur duquel j’étais amoureux (j’ai souvent été amoureux des soeurs de mes camarades) et qui vivait là, à l’époque, dans un appartement immense et beau, dont l’immmensité se confondait, dans mon esprit, avec le métier, la charge, plutôt, de son père : avocat au Conseil.

Plus loin, au moment d’arriver sur l’esplanade des Invalides, j’ai croisé deux femmes, qui s’étaient rejointes sur un trottoir après avoir traversé la rue. Elles étaient heureuses et pleines d’entrain  alors que leur conversation, joyeuse et souriante, portait sur une assurance vie souscrite par je-ne-sais-qui, dans je-ne-sais-quel pays d’Afrique, assurance dont elles se demandaient le montant. Et elles riaient, et elles riaient, et elles riaient.

Sur l’esplanade et sur le pont Alexandre III, des touristes se promenaient, ouvrant leurs yeux sur les beautés de la ville.

Rue François Ier, une foule se pressait, comme chaque matin, devant les studios d’Europe 1, foule tranquille attendant de pouvoir entrer dans le bâtiment, ou peut-être simplement d’apercevoir une vedette ou une personnalité.

Et c’est au moment où je traversais l’avenue George V, pénétré de cette légèreté fraiche et souriante,  que je me suis demandé s’il existait un mot, un substantif pour “délicieux”.

Déliciosité” m’est venu.

Aldor Écrit par :

8 Comments

  1. Très belle improvisation, mais n’y a-t-il pas, tout simplement, le substantif “délice” ? Le Littré dit d’ailleurs “lieu de délices, lieu où l’on se plaît infiniment”. 😉

    • 3 juin 2017
      Reply

      Ah ! Joséphine, oui. Car c’est en partie de cela que je voulais parler.

      Mais non, aussi, car il y a avait autre chose : cet on-ne-sait-quoi qui fait du délice un délice, cette sorte de charme qui plane et agit

      Ce que je cher

  2. Belle métamorphose des sens que celle du dôme de St Supplice.
    ça me plait 🙂

    • 3 juin 2017
      Reply

      Oh. L’architecte y avait sûrement déjà pensé 😉

  3. 3 juin 2017
    Reply

    Et puis moi j’aime bien quand on invente des mots…Ils se soulignent en rouge dans le texte, c’est beau.
    Déliciosité, ça m’épantèle… 😉
    ¸¸.•*¨*• ☆

  4. 3 juin 2017
    Reply

    Ah ! Si ça vous épantèle, Célestine, tout cela n’aura pas été vain !
    😄

  5. 8 juin 2017
    Reply

    Merci pour cette ballade si vivante… tout en déliciosité.

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