Les mauvaises réponses sont souvent les bonnes

 

 

Très souvent, les réponses les plus adéquates à un problème ou à une question paraissent dans un premier temps ne pas y répondre ; elles sont à côté du sujet. Et c’est ensuite seulement qu’on se rend compte de ce que ces étranges réponses étaient en fait les meilleures qui puissent être données.

Le phénomène est analogue à celui qui fait que le bien n’est pas le contraire du mal mais une chose qui se déploie dans d’autres couches et d’autres dimensions : la réponse la plus adéquate est souvent ailleurs que là où on l’attendait parce que la vérité est souvent plus englobante, plus large, plus multidimensionnelle que la question restrictive, et parfois mal posée, que nous avions soulevée, et qu’il faut, pour y bien répondre, prendre de la hauteur et de la distance, considérer les choses d’un point de vue plus vaste.

On comprend ainsi, avec une autre approche, ce que Simone Weil disait de la bonne façon de résoudre un exercice de mathématiques ou une version latine : il ne s’agit pas de se concentrer son esprit sur les éléments du problème, mais de faire preuve d’attention – ce qui est le contraire de la concentration. Non pas se focaliser sur quelque chose mais avoir l’esprit ouvert, vigilant, en veille, de façon à ce qu’il puisse percevoir les signaux légers, venus d’ailleurs, qui permettront d’éclairer soudainement notre problème. Laisser son esprit libre pour qu’il puisse attraper au vol les intuitions et les analogies qui, modifiant notre façon de voir, nous donneront la clé.

C’est très souvent ainsi que se passent les choses : c’est en ne cherchant pas qu’on trouve et en pensant à autre chose qu’on résout les problèmes.

Et c’est en songeant aux réponses qui nous paraissaient ne pas répondre, aux réponses qui nous paraissaient à côté, qu’on découvre souvent les solutions que nous avions longtemps cherchées. un peu comme ces réponses, ouvertes ou incompréhensibles, de sybilles ou de devins, dont la sens et la vérité ne se dévoilent que progressivement parce qu’ils ouvrent sur autre chose.

C’est que la vérité est souvent plus large et plus englobante que la pauvre vision que nous en avons, qui s’exprime dans nos questions, et dont il faut sortir pour saisir les réponses.

Tel est l’éclairage de l’analogie et de l’intuition.

Aldor Écrit par :

14 Comments

  1. 9 septembre 2017
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    C’est bien ce que je pensais j’ai toujours raison lol !!!

  2. 9 septembre 2017
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    Oui, oui, oui, mille fois oui! Merci pour cet éclairage qui dit mieux que je ne pourrais le faire cette vérité là! Je m’efforce toujours d’accueillir les réponses de mes élèves ainsi: ce n’est pas ce que j’attendais, mais n’est-ce pas juste d’une autre manière? Parfois la pirouette est difficile à faire, quand même!

    • 10 septembre 2017
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      Merci, Clémentine. La difficulté, effectivement, est que ça n’est pas une règle absolue. Il y a parfois de vraies mauvaises réponses… On ne peut se fier à rien…

      En fait, je pensais plus à des questions un peu stupides et oiseuses, du genre de celles que je pose à Katia : “Est-ce que tu m’aimes ?”, “Que veux-tu dire quand tu dis ça ?”. Et à ces questions, répondre du tac au tac pérennise le caractère oiseux et stupide de la question alors qu’il faut en sortir.

      Mieux vaut donc répondre autrement.

      (C’est clair dans mon esprit à mes heures de lucidité ; mais je ne suis pas toujours lucide, il s’en faut !)

      • 10 septembre 2017
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        😀
        “Est-ce-tu m’aimes” etc… Questions oiseuses qui à mon sens, ne veulent dire qu’une chose: “je t’aime!”. La forme interrogative traduit seulement l’inquiétude inhérente à l’état d’amour. En fait ces questions-là, ce sont surtout de petits mots d’amour, des mots-caresses, non?

        • 11 septembre 2017
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          Bonsoir, Clémentine. Faisant moi-même un très large usage de la forme interrogative : “Est-ce que tu m’aimes ?” comme de la forme positive : “Je t’aime.”, je crois que non.

          Déjà, la forme positive appelant et attendant un “Moi aussi”, elle est le plus souvent, sous son habit flatteur de caresse, une sorte d’appel et de demande. Mais la forme interrogative ne revêt pas même pas ces oripeaux ! Et c’est sans rien cacher, sans masque, qu’elle avance, affichant vertement son sens d’appel à l’aide ou au secours, a minima de signe d’inquiétude – quand ça n’est pas la sorte de désespérance de Brigitte Bardot dans Le Mépris…

          • 12 septembre 2017

            Certainement qu’il y a des “est-ce que tu m’aimes” comme tu dis, peut-être beaucoup!
            Mais sans doute avons-nous un rapport intime avec ces formules, et que cette intimité nait aussi de l’intimité, la connivence d’un couple.

    • 13 septembre 2017
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      Clémentine, je me suis souvent trouvée confrontée à ces réponses “surprenantes”; la difficulté est d’arriver à comprendre le cheminement de réflexion de l’élève qui l’y a conduit. J’aimais bien ce défi; d’ailleurs l’élève en question était rarement le seul à “errer” dans son raisonnement et c’était donc “bien” (et nous y revoilà) d’avoir donné une “mauvaise” réponse.

  3. 9 septembre 2017
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    “Percevoir les signaux légers, venus d’ailleurs…” : je ne saurais mieux dire 🙂

    • 10 septembre 2017
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      Oh ! Il y a sûrement de meilleures façons de le dire ! Mais merci, Esther.

      • 10 septembre 2017
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        Oui, mais c’est vous qui l’avez dit. Je m’en tiendrai donc à cette version originale. 🙂

  4. 9 septembre 2017
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    Je pense compte tenu de mon expérience dans l’activité théâtrale la vérité est l’aboutissement de talonnements successifs dont les résultats se suivent et ne se ressemblent pas jusqu’à ce que tous les ingrédients soient réunis pour décider que c’est la vérité du moment qui pourait changer avec le temps et l’évolution de la société.
    Cette activité nous a permis de garder notre subconscient en éveil qui faisait le filtre des données réunies même quand nous étions au repos. Ce qui a développé nos intuitions sur tel ou tel jugement auquel il fallait trouver une réponse.

    • 10 septembre 2017
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      Il y a sûrement du vrai dans ce que tu dis, Charef : il y a des bouts de vérité qui se déposent en couches successives. Et à un moment donné, qui peut changer avec le temps et l’environnement, ça y est : la vérité est là. Elle est née du palimpseste des réponses incomplètes et de leur accumulation, plus riche que si elle avait été apportée d’une seule traite…

      • 10 septembre 2017
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        La quête de la vérité s’enrichit également de l’expérience et des recherches approfondies qui demande du temps de la patience pour reconstituer le puzzle.

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