Vérités poreuses et vérités étanches


 

Il y a des vérités poreuses et des vérités étanches.

Les vérités poreuses sont gentilles et, même voilées, peuvent être perçues : plongées dans l’erreur, elles laissent échapper des bulles, un parfum, une couleur, des effluves – que sais-je ? –  qui font qu’elles peuvent, avec un peu d’attention (et l’attention sert aussi à cela), être devinées. Je pense ce que je pense, suis dans l’erreur peut-être mais, au fond de moi, quelque chose proteste, hurle ou murmure, qui me donne à penser que tout n’est peut-être pas aussi serein, aussi dépourvu de nuages que je voudrais le croire. Il y a comme un regret, comme un remords qui, quelque part, d’une certaine façon, se manifeste. Et l’attention aide à percevoir plus en amont ce genre de message.

Et puis il y a les vérités étanches, les vérités imperméables. Celles-ci ne se révèlent qu’à ceux qui les ont embrassées, ne se découvrent qu’à ceux qui les ont déjà trouvées. A qui est dans l’erreur, elles ne se révèlent pas et sont comme recouvertes d’une cape d’invisibilité qui ne se déchire qu’après le but atteint, quand le dévoilement n’est plus nécessaire. Mais tant que le pied n’a pas été posé sur ce nouveau monde, rien n’y paraît. Il n’y a, devant nous, qu’un océan vide où rien ne paraît se cacher, où rien, apparemment, ne gît. Et ces vérités là, qui sont secrètes et invisibles, qui sont des vérités fières et farouches, concernent peut-être les choses les plus importantes, les choses les plus capitales, les choses essentielles. Et il faut, pour les connaître, se jeter dans le vide, faire acte de foi, de confiance, croire sur parole et sur rien d’autre cette personne qui s’est tournée vers nous, nous a parlé et nous a dit des mots qui en rien ne résonnent en nous, qui n’éveillent ni ne remuent rien.

Croire sur parole. Suivre, comme le ferait un aveugle, la personne qui nous conduit, la main posée sur son épaule, parce que nous croyons en elle et sans autre raison.


La musique d’introduction est un extrait du premier morceau de “l’Hiver”, dans les Quatre saisons, de Vivaldi, telles que Recomposed par Max Richter.

Aldor Écrit par :

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