Les visages des passantes


 

Les visages sont émouvants.

Longtemps, j’ai préféré les visages souriants, qui affichent joie et confiance. Et depuis quelques mois, un changement s’opère : à ces visages-là, agréables et purement harmonieux, ronds, je préfère l’entrevision de la faille ouvrant sur les profondeurs, la tristesse ou la réserve.

Peut-être par culture ou éducation masculine, peut-être par héritage génétique, je préfère les visages des femmes. Je les trouve non seulement plus beaux mais plus parlant, plus sensibles, plus révélateurs : la bouche, les yeux, et jusqu’au port de tête, tant de choses s’y lisent, s’y dévoilent, s’y devinent, qui laissent ému qui y prête attention !

Les sourires qui s’esquissent, les rires qui s’ébauchent ou qui se retiennent, la confiance et le bonheur lancés au vent dans l’éclat des dents brillant au soleil ou au au contraire cette retombée des lèvres, cet affaissement de la bouche, cette grimace qui se marque et qui marque la tristesse, l’abattement, le désespoir.

Dans les yeux, on voit tout passer : la joie, la surprise, la gêne, l’inquiétude sourde, et plus profondément l’humilité, la gentillesse, la bonté. Et puis cette sorte de folie commune, de fuite constante, qu’on rencontre si souvent et qui, certainement, s’empare de loin en loin de chacun d’entre nous, et qui fait ce regard mouvant, ces yeux incapables de se fixer et qui regardent on-ne-sait où.

Et puis, par dessus tout ça, le pas qui continue, comme si de rien n’était. Il y a cette tête, portée haute ou basse, droite ou voûtée, ce visage au travers duquel se lit (ou croit-on lire?) tant de choses, et puis ce corps qui bouge, qui avance de sa propre marche, comme si de rien n’était, comme une horloge bien huilée scandant impassiblement son rythme mécanique.

Et tout cela tout ensemble, exprimant tout ensemble toute la richesse, toute la profondeur, toute l’épaisseur de ces femmes, de ces hommes, de cette humanité qui avance dans la rue, affichant dans son visage et dans son pas la condition humaine.

Aldor Écrit par :

3 Comments

    • 21 juillet 2018
      Reply

      Merci, Clémentine.

  1. celestine
    29 juillet 2018
    Reply

    Tu es un grand contemplateur, et j’aime ça !
    ¸¸.•¨• ☆

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