Retirer sa signature d’une pétition au seul motif qu’elle fut lancée par une personne qu’on estime peu recommandable, c’est disqualifier la parole en considérant que les mots sont moins importants que celui qui les prononce.
Auteur/autrice : Aldor
Nous nous complaisons dans le vertige mallarméen d’un néant qui se mire et trouve, ma foi, qu’il présente assez bien.
En l’absence de partage, le plaisir de la liberté se dissout et file entre nos doigts ; il devient une sorte de fausse monnaie, de chose à jamais trompeuse et incomplète
Elle devait sentir cela, Simone de Beauvoir, quand elle croisait Simone Weil : qu’elle était certes un peu ridicule, un peu pénible, cette jeune femme, avec cette façon de prendre tout à coeur et de verser des larmes qui ne servaient à rien ; mais aussi que sans des êtres comme cela, sans des coeurs capables de battre à travers l’univers entier, le monde était perdu.
Il y a tant de choses dont nous sommes insatisfaits et dont rendons le manque de temps responsable en sachant bien, au fond, que le temps n’y est pour rien et que nous y sommes pour tout.
À chaque instant, la vie suscite de l’inédit, rendant caducs nos scénarios et créant de nouveaux possibles, qui n’avaient pas été envisagés. Les systèmes physiques et mécaniques ont des points de basculement au-delà desquels les règles changent ; chez les êtres vivants, chaque instant est point de basculement ouvrant sur l’inconnu.
Certains semblent parfois s’interroger sur la volonté réelle de nos gouvernants de lutter pour plus d’égalité. Shame on them. On peut, dans l’ombre, sans tambour ni trompette, sans chercher à attirer sur soi les gros titres, faire avancer les choses et réduire les inégalités inégalités territoriales qui, insidieusement, sapent l’unité de la République. La preuve en est faite.
Il faut, pour traduire, accepter de changer un instant de point de vue, vouloir sortir du cocon, de la familiarité, mais aussi de la discipline d’expression et de pensée que crée et en quoi consiste le “génie de la langue”, cette façon particulière que nous avons de dire et de bâtir le monde en le disant.
Cela, nos sociétés aussi doivent l’apprendre : qu’il existe un plaisir à jouir de la beauté du monde sans en faire sa chose, sans chercher à en explorer, à en épuiser, à en exploiter la totalité ; qu’il existe un plaisir à maintenir et à savoir qu’existe un au-delà, un intouché, une place pour autre chose.