J’aimerais être Marcel Proust pour décrire avec élégance : élégance, bienveillance, amusement et un brin de regret peut-être ; pour décrire avec élégance et précision, un peu de peine à de la joie mêlée, le soulagement surpris que je ressens, après ces semaines de vide étatique, en constatant que, finalement, l’absence de décision et quasi de gouvernement n’a pas été si catastrophique, et qu’elle a au contraire permis de se rendre compte, de confirmer plutôt, que les choses les plus importantes, les plus essentielles, n’ont pas pour cadre les bureaux des ministères mais la rue, les écoles, les hôpitaux, les champs, les livres, les salles de spectacle, les terrains de sport et, pour évoquer cette affaire sordide et peut-être banale, les prétoires.
Ce que je veux dire, nous en parlions l’autre soir avec un groupe que Laurence Bouchet, l’animatrice et conductrice de la Philomobile avait réuni ; ce que je veux dire, c’est qu’il faut évidemment des lois : des lois, des décrets, des arrêtés pour imposer quelques règles et surtout interdire ce qui nuit ; mais que, même s’il peut être absolument justifié de les prendre en avance de phase, quand la société prise dans son ensemble peine à bouger et qu’il faut, comme pour l’abolition de la peine de mort, susciter le mouvement, c’est toujours un peu un échec quand on s’en remet à la loi pour punir des comportements que nous devrions de nous-mêmes nous interdire.
Et voilà (Ô magie de l’écriture et de l’introspection !), voilà qu’écrivant cela, je bascule sur le sentiment inverse de celui sur lequel j’avais commencé : si l’action politique ne consiste en effet qu’à prendre acte et transcrire dans des textes les demandes et consensus sociaux, on peut très bien s’en passer. Mais sa grandeur et sa véritable vertu est d’éclairer le chemin, de bousculer un peu la société pour la faire évoluer.
La politique, c’est un peu l’équivalent social de la rencontre amoureuse : ce bouleversement qui nous sort de nous-mêmes et nous permet de grandir.
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La Politique en général et avec un grand P, sûrement. Mais dans les actes politiques, du gouvernement, il n’y a pas que des lois. Il y a des orientations budgétaires, des instructions qui tombent, littéralement, sur les instituteurs-trices, infirmiers-ières, bénévoles d’association d’aide, personnel-elle des établissements d’accueil, greffiers-ières, forces de l’ordre … et j’en oublie, par dizaines. Je doute qu’elles émanent toutes de la société. D’ailleurs, le forum d’expression de la société existe-t-il vraiment ?
Belle journée à toi, Aldor.