Aussi étonnant que cela puisse paraître, l’élégance est aussi une vertu. Elle est à tout le moins une qualité renfermant des vertus qu’on ne s’attendrait peut-être pas à y trouver, celles de détachement et d’humilité.
L’élégance consiste à assumer totalement son rôle, sa fonction sociale ou humaine, en faisant abstraction de soi. L’élégant ne tient aucun compte de ses préférences, de ses douleurs, de son humeur, de ses peines ou de sa joie ; il les accueille avec sérénité, les laisse passer et tient la tête droite et haute, sachant que cela n’est d’aucune importance, que son propre sort est secondaire et que l’essentiel est dans le grand spectacle de la vie, qui doit continuer.
L’élégance est détachement, et humilité. Les apparences peuvent bien jouer contre elle car l’élégance, hiératique, est souvent fière ; elle n’en est pas moins, au fond, une attitude de soumission par laquelle on s’oublie soi-même pour ne demeurer que l’instrument d’une force supérieure, qui nous guide et que nous ne faisons qu’incarner.
Et la douceur, dans cela ? Une douceur élégante ou une élégance douce, cela paraît relever de l’oxymore. Et pourtant, ces deux qualités, ces deux vertus peut-être, coexistent dans une troisième qui est la dignité. La dignité est exactement cette élégance faite douce, quand la fierté est plutôt une élégance rugueuse. La dignité est l’élégance des personnes qui, frappées ou non par le sort, acceptent pleinement leur destin, ou qui du moins ne se mettent pas en avant, ne se préoccupent pas d’elles-mêmes dans la protestation qu’elles peuvent émettre. La dignité fait abstraction de soi pour ne se préoccuper que du bien de tous, comme Etty Hillesum au camp de Westerbork, ou le capitaine dont le navire fait naufrage et qui embarquera le dernier, s’il le peut encore quand tous les autres auront été sauvés.
L’ironie du sort, mais qui est aussi la saveur de la vie, est que rien ne soit si semblable à l’élégance et à la dignité que leur exact contraire : la prétention qui se met en avant et se gonfle comme une outre.
Elles sont si ressemblantes, vues du dehors ! Et si étrangères, dans leur intention.
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Vraiment, tu ne parviens pas à distinguer l’élégance de ma prétention ?
J’aime ton texte, il pose de belles questions sur les vertus humaines…
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je suis trahie par la saisie automatique qui me fait écrire des lapsus affreux…
Je voulais écrire « la » prétention… Mais bon, peut-être suis-je prétentieuse, au fond… 😉
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A ta question, chère Célestine, je ne saurais répondre. Je ne pense pas que tu sois très prétentieuse mais peut-être l’es-tu un peu. Je crois par exemple que si, moi, je ne l’étais pas du tout je ne publierais pas un blog, surtout en m’enregistrant. A moins que ce ne soit pas de la prétention. Je ne suis pas très à l’aise, à vrai dire, avec cette question.
A mon humble avis, ce qui distingue la prétention de l’élégance, c’est l’autodérision…
J’en fais suffisamment preuve pour me permettre de croire que je ne suis pas prétentieuse.
Ecrire, ce n’est pas être prétentieux, quand c’est fait dans une certaine humilité.
Je suis pleine de doute et je me remets souvent en cause. Alors, le « gonflage comme une outre » très peu pour moi.
Et je pense que tu es pareil, d’après ce que je sais de toi…
Ai-je répondu avec élégance ? 😉
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… Le prétentieux ne fait pas d’autodérision, c’est certain (encore que je n’ens sois pas si certain, en fait). Mais je ne suis pas sûr que l’élégant, ou le digne, en fasse beaucoup. La dérision n’est pas tellement son genre, tout simplement.
Donc, non, chère Célestine, je ne pense pas que ce soit l’autodérision qui distingue l’élégance de la prétention.
C’est quelque chose de plus aérien : l’intention – qui change tout.