Confort du sommeil, confort de la pensée

Last updated on 14 décembre 2019


 

Je me suis réveillé cette nuit au milieu de la nuit et, essayant de retrouver le sommeil, je me suis rendu compte que je ne pouvais me rendormir qu’en adoptant certaines positions : la jambe comme ci, le bras comme ça, la tête ainsi, etc. Dès que je sortais de ces positions figées qui m’étaient confortables, les tensions musculaires m’empêchaient de me rendormir.

Voilà une illustration concrète de ce qu’on appelle parfois la zone de confort : ces façons d’être vers lesquelles tout ramène parce qu’on s’y sent bien, que tout y est relativement aisé alors que, dès qu’on en sort, tout devient difficile ou exige de l’exercice

Ce qui vaut pour le sommeil vaut également pour la pensée. Ainsi, ce matin, sur LinkedIn, quelqu’un qui, critiquant le peu d’ambition (relatif) du projet de Green deal  présenté par la Commission européenne, l’expliquait notamment par l’âge des membres de la nouvelle Commission que préside Ursula von der Leyen.  

Cette explication est typique, elle aussi, d’un confort de pensée qui vise à minimiser l’effort. Que l’âge joue un rôle dans la façon dont on envisage le choses est en effet une évidence (le contraire serait attristant) ; mais qu’on y voit un des facteurs principaux d’explication d’une pensée sans prendre la peine de pousser l’analyse plus loin est évidemment réducteur – mais tellement plus simple !

Les explications simples ont ce grand avantage qu’elles nous évitent de mettre la main dans le cambouis, dans l’épaisseur des choses, et nous permettent de nous en tenir à la seule la dernière couche, qui est la plus superficielle. Or autant il est évident que l’âge et le milieu d’origine des commissaires jouent un rôle dans la position de la Commission, autant il est presque injurieux de se limiter à cette explication, et de rejeter dans le néant – qu’on n’a pas à penser – les autres raisons imaginables, par exemple en l’occurrence la difficulté de la tâche assignée.

Au rebours de la règle du rasoir d’Ockham, sauter sur la première explication qui nous vient à l’esprit, qui est souvent la plus superficielle, sans chercher à envisager d’autres points de vue ou d’autres motivations à l’action d’autrui, est souvent l’effet de la paresse, d’un souhait de rester douillettement dans ce qu’on connaît et qui ne demande pas d’efforts. Et c’est de ce confort-là, qui fait ornière et forme œillères, qu’il faut inlassablement chercher à se dégager, comme cette nuit, dans mon lit, des positions qui me sont familières, car celles-là empoissent l’esprit comme celle-ci recroquevillent le corps.


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2 Comments

  1. 14 décembre 2019
    Reply

    Pour la position du corps pour dormir, mieux vaut être dans sa zone de confort ! Pour ce qui est de la pensée, il est navrant de constater, comme tu le fais judicieusement, que l’on se contente du facile, du simple ! Amitiés Aldor.

    • 14 décembre 2019
      Reply

      Tu as absolument raison, Catherine. L’exemple du sommeil a déclenché ma pensée mais il n’est pas bon, au fond. Parce que le confort est conforme au sommeil mais pas à la pensée.

      Amitiés.

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