Il y a des mots et des formules qui souillent le monde tellement ils réduisent sa grandeur et sa beauté à du préfabriqué. Ainsi, ceux de cette dame qui, hier en fin de journée, parlant à son compagnon sur le télésiège à Hauteluce, lui disait, parlant du jour qui touchait à sa fin : « les conditions étaient optimales ».
« Les conditions étaient optimales » !
Nous avions vu la splendeur du monde : un ciel plus que bleu, un horizon dégagé, un soleil éclatant et qui formait un coeur, des rochers escaladant les cieux, le murmure mignon des ruisseaux, la neige immaculée, des sapins de blanc chevelus et, de toute cette magnificence, ma voisine de télésiège retenait les « conditions optimales », avec cette formulation préfabriquée et débilitante faite pour décrire un logiciel ou l’organisation d’une force de vente !
Quelle tristesse que cette réduction de la grandeur du monde à une formule de marketing !
Peut-être cette façon de parler a-t-elle un lien avec le ski alpin, me disais-je ce matin : dans l’immensité sauvage des monts, nous avons tracé des pistes domestiques, serviles et damées d’où nous prétendons dominer la montagne alors que nous l’avons réduite à une voie d’autoroute.
Et c’est ainsi toujours que nous agissons : quand nous prétendons dominer l’incroyable nature, nous l’avons d’abord réduite au presque rien accessible à notre intelligence et à nos moyens. Et c’est cette pauvre nature servilisée et réduite au presque rien que seule nous dominons.
PS : Et, évidemment ! Parlant de ma voisine de télésiège, c’est de moi aussi que je parle. Combien de fois m’est-il arrivé et m’arrivera-t-il encore de réduire le monde ou un être aux petites dimensions qu’il m’est loisible d’embrasser !
En savoir plus sur Improvisations
Subscribe to get the latest posts sent to your email.
Tu as raison il faudrait magnifier la splendeur de la nature à chaque seconde ! Mais parfois nous sommes juste dans le banal. Est ce mal ?