Parler pour ne rien dire


Durant les vacances, j’empruntais souvent une navette pleine de monde pour grimper vers les hauteurs. Et les gens parlaient, parlaient, parlaient. Et le plus souvent parlaient pour ne rien dire : blagues éculées, dictons météorologiques, gentilles moqueries, etc. Et tout le monde était content de baigner dans ce brouhaha ou ce murmure d’insignifiance qui avait un parfum de vacances et de détente. On s’y sentait au chaud et rassuré.

Je sais bien que parfois, on parle au contraire pour combler le silence, pour effacer la gêne qu’il peut susciter. Mais là, c’était le contraire : une sorte de grognement social à la bonobo, d’expression du contentement d’être là, ensemble  et que les propos n’aient ni queue ni tête ni quelconque intérêt n’avait aucune importance ; c’était la voix qui importait.

C’est comme ces réunions qui ne débouchent sur aucune décision, sur rien de concret mais qui sont cependant très importantes parce qu’elles permettent de se croiser, de se frotter, de socialiser.

Le sens aussi, souvent, est important dans le langage. Il permet bien des choses. Mais parler pour ne rien dire, a minima parler et ne rien dire, exprime parfois l’essentiel de ce qui est ressenti et qu’on veut instinctivement exprimer : le simple bonheur d’être parmi ses semblables, avec confiance et empathie. Ce bonheur primaire qui peut, entre personnes intimes et qui s’aiment, s’exprimer par le silence mais qui nécessite, dans un groupe plus large, des mots. Des mots qui disent mais dont le sens ne veut rien dire.

 


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