On se rend mieux compte, maintenant,
Que la bouche,
La bouche, souvent,
Dans le visage mangeait les yeux,
Avalant, aspirant, effaçant le regard.
On ne voyait plus qu’elle et ses lèvres et ses dents,
Cette bouche pulpeuse d’où sortaient les sourires,
Les paroles et les phrases, les rires et les mots,
Tous ces sons assemblés qui faisaient sens ensemble
Disant parfois la vérité
Et parfois le mensonge.
Ô sourires hypocrites, ô mots de circonstance,
Qui si élégamment saviez
Sortir comme des serpents de cette bouche d’ombre
Et piquer l’auditeur accroché à vos lèvres,
L’enchanter de vos mots caressants,
Le séduire d’un sourire ravissant.
Je me demande si les regards,
Les longs regards de khôl lestés,
Ne sont pas, sans les mots et la bouche cachée,
Plus véridiques et moins manipulables,
Plus insoumis et indisciplinés.
Les longs regards pensifs ou gais ou éveillés,
Les yeux inexpressifs et puis les yeux de biche
Qu’on avait oubliés et qui se rerévèlent,
Soulignés par le trait du masque.
La bouche disparue, les yeux réapparaissent,
Ils sont parfois muets comme un chemin fermé,
Et sont parfois la porte des étoiles.
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Bonjour,
merci Aldor pour ton regard inspiré sur nos vies masquées.
À mes yeux le pire reste le regard inexpressif.
Un jour que je cousais des masques en tissu pour mes filles, j’ai enfilé la dite pièce d’étoffe et je me suis amusée à observer mon regard.
Covid-girl ou vengeresse masquée tu choisis, mais ce qui est sûr c’est que la solitude de mon regard sans visage m’a un temps déstabilisée.
J’ai souri…et presque rien dans mon regard.
J’ai déposé dans mes yeux des sentiments joyeux, et des rayons de lumière se sont mis sourdre.
J’ai soudain repensé aux propos de mon coiffeur.
Il me disait qu’il détestait cette période, parce qu’il ne voit plus les visages.
Qu’en coupant ou en coiffant les cheveux, il doit désormais deviner ce qui sera juste et harmonisera le visage. Il se sent complètement déprimé, et a l’impression de ne plus exercer son métier que pour se nourrir. Il ne trouve plus de sens ni de goût à son métier…
La bonne journée.
Co