Une angoisse fiévreuse m’est venue cette nuit tandis que, cherchant le sommeil, je me traînais de rêve en rêve.
Je devais rendre prochainement mon mémoire, mon mémoire d’histoire, consacré à Jean Vilar. Mais mon Jean Vilar n’était pas l’homme de théâtre. C’était un politicien de la Troisième République, un homme en noir et blanc habillé d’un chapeau façon Joseph Caillaux.
L’angoisse me prenait car je réalisais que j’avais bien étudié la psychologie de cet homme, que je le comprenais, étais capable d’expliquer sa vision du monde et son comportement ; mais que je ne savais rien de sa vie, rien des fonctions et des responsabilités qu’il avait occupées. Sans doute était-il avocat (il fallait que je le vérifie) mais j’avais, sur la question du personnage historique qui justifiait que je m’y intéresse, complètement fait l’impasse. À quelques heures de ma soutenance, je découvrais ce trou béant dans mon travail.
En arrière-plan mais pesant déjà distinctement dans l’émotion ressentie, rejouait l’étreinte d’une angoisse plus profonde, que je traîne depuis des dizaines d’années, et qui régulièrement remonte, aussi déplacée soit-elle devenue : je marche dans la rue pour aller m’inscrire à l’Université, à la Sorbonne précisément ; ou plus exactement, pour y demander la prolongation, le renouvellement d’un emploi, que j’occupe depuis un certain temps et pour lequel je n’ai pas vraiment les titres nécessaires : je fais bien mon travail, les étudiants sont contents de moi mais je n’y ai pas droit parce que je n’ai pas mon doctorat.
La cause réelle de mon angoisse n’est pas l’administration mais mon père qui, depuis toujours, nous enjoint, mon frère et moi (moins ma sœur, ce me semble), de faire un doctorat ; et nous en parle tellement que nous en sommes dégoûtés. C’est devant lui, plus que devant tout autre, que je redoute de devoir me justifier.
Je me réveille mal à l’aise, bien que cela n’ait plus de sens. Et avec cette question : pourquoi Jean Vilar ?
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Jean vit l’Art ?
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