Sauter pour mieux reculer : les objectifs écologiques

A la lecture de cette disposition, un sourire de bonheur se dessine sur nos lèvres, tandis qu’un Hourra, bercé par l’Hymne à la joie, naît dans notre coeur ému…

Hélas, hélas, hélas et patatras ! Le bonheur est de courte durée : à peine l’oeil a-t-il quitté l’article premier qu’il aperçoit l’article 3, où il est précisé que “lorsqu’elles sont plus avantageuses”, les anciennes conditions d’accès à la prime écologique restent pour le moment applicables.

Quel retournement ! Et quelle étrange manière de présenter les choses ! On met en avant, en exergue, un objectif ambitieux, difficile à atteindre, et quelques lignes plus loin, de façon détournée et insidieuse, on vide cet objectif de toute susbstance en expliquant que, transitoirement, on pourra y déroger.

J’ai bien conscience des motivations industrielles, économiques, sociales, qui peuvent expliquer qu’on prolonge le bonus écologique actuel. Même s’il serait également concevable d’arrêter de subventionner toutes les voitures individuelles, ce bonus aide sans doute à substituer à des voitures très polluantes des voitures moins polluantes. Mais pourquoi ne le dit-on pas d’entrée de jeu et présente-t-on les choses comme si l’on durcissait les critères alors qu’on maintient et prolonge ceux qui sont en place ?

Je ne jette pas ici la pierre à l’administration ou au rédacteur du texte. Je pense que, chaque jour, dans mes affaires privées, j’agis de cette même manière hypocrite consistant à prétendre sauter pour en fait mieux reculer : promis, juré, craché ; à partir de demain je suis irréprochable (mais du coup, ce soir, je me lache).

Il y a sûrement à cela des ressorts psychologiques profonds dont le plus important est probablement que nous ne pouvons réellement nous mobiliser que pour des grandes causes, de grands desseins, de grandes querelles, aurait dit le Général, et qu’il est donc plus motivant, plus mobilisateur de se fixer un objectif ambitieux et un peu lointain qu’un objectif proche mais dénué de toute symbolique : gravir l’Everest ou atteindre le zéro carbone, ça a plus de gueule et enthousiasme plus que gravir la cote de Dammartin ou descendre à 30 grammes.

Mais comme cet objectif est plus lointain et qu’on ne prend plus la peine de dessiner les marches permettant d’y d’atteindre, on prend également le risque de construire un mur infranchissable, une sorte de “Demain, on rase gratis” géant revenant à ne rien faire. C’est ce qui paraît se passer avec ces grands objectifs écologiques que nous donnons, qui sont chaque jour plus ambitieux et plus extraordinaires, mais qu’on accompagne systématiquement de dérogations pour l’immédiat, qui en constituent le véritable effet utile.

Nous confions ainsi à nos enfants le soin de résoudre l’immense paquet de problèmes que, chaque jour et patiemment, nous faisons grossir et fourgons sous leur tapis. Le contraire d’une attitude responsable.



Décret n° 2022-960 du 29 juin 2022 relatif aux aides à l’acquisition ou à la location de véhicules peu polluants

La Première ministre,
Sur le rapport de la ministre de la transition énergétique,
Vu le code civil, notamment son article 1er ;
Vu le code de l’énergie, et notamment ses articles D. 251-1-1 et D. 251-7 ;
Vu le décret n° 2021-1866 du 29 décembre 2021 relatif aux aides à l’acquisition ou à la location de véhicules peu polluants ;
Vu l’urgence,
Décrète :

  • Article 1
    Le code de l’énergie est ainsi modifié :
    1° Au 5° de l’article D. 251-1-1 du code de l’énergie, les mots : « inférieure ou égale à 20 grammes » sont remplacés par les mots : « égale à 0 gramme » ;
    2° L’article D. 251-7 du code de l’énergie est ainsi modifié :
    a) Au 1°, 2° et 3°, les mots : « inférieur ou égal à 20 grammes par kilomètre » sont remplacés par les mots : « égal à 0 gramme par kilomètre » ;
    b) Au 3° bis, les mots : « inférieur ou égal à 20 grammes par kilomètre » sont remplacés par les mots : « égal à 0 gramme par kilomètre » ;
    c) Au 1° et au 2°, le nombre : « 45 000 » est remplacé par le nombre : « 47 000 ».
  • Article 2
    L’article D. 251-7 est ainsi modifié :
    1° Au 1°, le nombre : « 6 000 » est remplacé par le nombre : « 5 000 » et le nombre : « 4 000 » est remplacé par le nombre : « 3 000 » ;
    2° Au 2° et au 3°, le nombre : « 2 000 » est remplacé par le nombre : « 1 000 » ;
    3° Le 7° est supprimé ;
    4° Le 8° est numéroté 7° et le 9° est numéroté 8°.
  • Article 3
    Lorsqu’elles sont plus avantageuses, les dispositions des articles D. 251-1-1 et D. 251-7 du code de l’énergie dans leur rédaction antérieure à l’article 1er du présent décret restent applicables aux véhicules qui n’ont pas fait l’objet précédemment d’une première immatriculation en France et à l’étranger, commandés ou dont le contrat de location a été signé avant le 30 juin 2022 inclus, à condition que leur facturation ou le versement du premier loyer intervienne au plus tard le 31 décembre 2022.Liens relatifs 
  • Article 4
    Lorsqu’elles sont plus avantageuses, les dispositions de l’article D. 251-7 du code de l’énergie dans sa rédaction antérieure à l’article 2 du présent décret restent applicables aux véhicules qui n’ont pas fait l’objet précédemment d’une première immatriculation en France et à l’étranger, commandés ou dont le contrat de location a été signé avant le 31 décembre 2022 inclus, à condition que leur facturation ou le versement du premier loyer intervienne au plus tard le 30 juin 2023.Liens relatifs 
  • Article 5
    Les articles2 et 4 du décret du 29 décembre 2021 susvisé sont abrogés.
  • Article 6
    Les articles 1er et 3 entrent en vigueur le 1er juillet 2022.
    Les articles 2 et 4 entrent en vigueur le 1er janvier 2023.
  • Article 7
    Le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, la ministre de la transition énergétique et le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française et entrera en vigueur immédiatement.


Fait le 29 juin 2022.


Élisabeth Borne
Par la Première ministre :


La ministre de la transition énergétique,
Agnès Pannier-Runacher


Le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique,
Bruno Le Maire


Le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics,
Gabriel Attal

Aldor Écrit par :

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