Acte de foi

Je ne crois pas que ce soit la méconnaissance ou la négation des effets catastrophiques du réchauffement climatique qui rende si laborieux, si lents, si hésitants, nos changements de comportement ; c’est l’immensité séparant ce que nous pouvons faire des effets positifs que cela aura – que cela aura peut-être, à condition que tout le monde s’y attelle, rapidement et pendant longtemps.

Quand Pascal, s’interrogeant sur l’existence de Dieu, conclut que mieux vaut croire parce qu’il y a peu à perdre et beaucoup à gagner, il est maître du jeu et directement concerné : si Dieu existe, il lui suffit, lui, Blaise, de croire et d’agir en conséquence pour être sauvé, immédiatement et indépendamment de ce que peuvent bien faire et penser les autres : action réaction, comme dit K.

Avec les changements de comportements nécessaires à la stabilisation du climat, et plus généralement au retour à une relation au monde non prédatrice, ça n’est pas du tout la même chose : notre action individuelle ne compte en soi pratiquement pour rien ; nous ne verrons pas nous-mêmes les conséquences positives de notre changement d’attitude ; celui-ci ne fera sentir ses effets que dans quelques siècles – et encore est-ce à la condition que tout le monde s’y mette, et rapidement. Je ne suis pas sûr que, dans ces conditions, le Pascal un peu ratiocinant du pari aurait signé.

Aussi scientifiquement fondées que soient les mises en garde contre le réchauffement climatique, le massacre du vivant et le pillage de la planète, inverser le cours des choses est en effet aussi une question de foi, comme l’a senti, depuis toujours, le pape François, et comme il l’a signifié, aussi bien dans son encyclique Laudato si que dans son exhortation apostolique Laudate Deum.

Foi non pas forcément en le Dieu de Pascal mais foi a minima en l’être humain, en sa dignité, en sa capacité à se laisser toucher par l’amour et à embrasser ainsi l’universel.

Ce n’est pas en le réchauffement climatique qu’il faut croire pour s’engager dans le changement ; c’est en notre courage et en celui des autres, en la capacité de tous : individus, groupes, entreprises, États, à faire abstraction de leur intérêt personnel et immédiat pour sauvegarder la possibilité d’un avenir commun.

De cela, il n’y aura jamais de preuve. Il y en aura toujours pour essayer de tirer leur épingle du jeu, pour grapiller ce qui peut l’être. Il faut faire avec et cependant avancer. Avancer sans attendre d’être sûr que les autres feront de même mais en y croyant parce que c’est par la confiance que la confiance se construit.

Là est l’acte de foi.

Aldor Écrit par :

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