Dans l’arrêt de la main et dans la retenue, quelque chose peut naître, qui n’était ni nécessaire, ni attendu. Et c’est ainsi que paraît l’autre grâce : dans le vide et le silence volontairement laissés, dans l’attente qui se répand, l’altérité, la création, le divin, peuvent advenir, en une répétition du Tsimtsoum initial.
Étiquette : pudeur
Il faut, pour trancher le noeud gordien, être soit un jeune Alexandre qui croit qu’il aura une longue vie pour réparer les pots cassés, soit un vieux Louis XV pensant qu’après lui le déluge. Dans l’entre deux de la maturité, on essaie d’être plus responsable.
On arrive à cette pointe extrême des idées où tout vibre et se retourne, ce qui est signe de vérité : car au-delà même de la simple apparence, il y a, dans le discours cyniquement égoïste des héros d’Ayn Rand, dans l’humour des personnages de Romain Gary, une élégance et un souci de l’Autre sans commune mesure avec celle des altruistes de profession. Et dans leur façon simple de ne pas raser les murs et parfois de se mettre en avant plus d’humilité vraie que dans l’orgueil de ceux qui prétendent ne jamais penser à eux.
Il en va des qualités comme des vertus et des sentiments les plus délicats : elles doivent être utilisées avec pudeur et chasteté, et l’étalage leur est fatale. Être, laisser voir mais en aucun cas ne montrer car la grâce s’anéantit de cette monstration.
Jouir du bonheur ne nous suffit pas ; il nous faut au surplus le faire savoir, dans un mélange de générosité et d’indécence.