On n’aspire pas seulement à vivre, on aspire à être heureux. C’est normal et sain mais il arrive que, sous l’effet de pensées perverses et manipulatrices, d’idéologies morbides et dominatrices, on l’oublie. Et cet oubli est une défaite de la joie, de l’esprit et de la vie.
Étiquette : bonheur
Dans ces affaires ou l’importance des choses se reconnaît au retournement, à l’hésitation continuelle de la conscience, le signe le plus clair de la pesanteur est ce besoin de vouloir trancher de facon définitive, cette incapacité à accepter la légèreté de l’être.
Il y a le sentiment que chaque chose suffirait au bonheur ; et la certitude que cela n’est pas vrai, que nous ne nous contentons de rien, qu’il nous faut du débordement, du jaillissement perpétuel ; que notre bonheur a l’apparence d’une paquerette s’agitant sous la brise d’été mais que son vrai visage est celui d’un Léviathan, d’un ogre jamais rassasié dont nous sommes les pantins.
La joie et le bonheur, quand ils sont dans l’élan du devenir, ont le charme de la terre promise. Mais celle-ci une fois atteinte, la tension du désir une fois retombée, le naturel revient, galopant, et c’est notre insondable propension à la bêtise et à la vanité qui reprend le dessus, comme chez ces Bourgeois de Brel qui se croient arrivés.
D’un point de vue politique, bonheur et joie sont très différents et ont des connotations presque opposées : quoi qu’ait pu en dire Saint-Just, le bonheur est conservateur et la joie révolutionnaire.
Le bonheur est un état. Et à certains d’entre nous, à beaucoup, peut-être à tous, manque un ingrédient supplémentaire qui, à cet état ajoute mouvement et élan, vibration, émotion : ce qui manque au bonheur pour que le bonheur soit complet, c’est la joie.
D’un côté la vie, avec son flux continu, ses oublis, son infidélité, ses trahisons, sa schizophrénie quotidienne ; de l’autre le pur, le vrai, l’authentique, l’incorruptible, mais qui au bout du compte, aux compromissions de la vie, préfère la mort.
Boulevard Raspail ce matin, Une jeune fille trottinait regardant son portable.Elle marcha lourdement dans une flaque d’eauEt je partis alors d’un grand éclat de rire.…
Jouir du bonheur ne nous suffit pas ; il nous faut au surplus le faire savoir, dans un mélange de générosité et d’indécence.