Certains semblent parfois s’interroger sur la volonté réelle de nos gouvernants de lutter pour plus d’égalité. Shame on them. On peut, dans l’ombre, sans tambour ni trompette, sans chercher à attirer sur soi les gros titres, faire avancer les choses et réduire les inégalités inégalités territoriales qui, insidieusement, sapent l’unité de la République. La preuve en est faite.
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Il faut, pour traduire, accepter de changer un instant de point de vue, vouloir sortir du cocon, de la familiarité, mais aussi de la discipline d’expression et de pensée que crée et en quoi consiste le « génie de la langue », cette façon particulière que nous avons de dire et de bâtir le monde en le disant.
Cela, nos sociétés aussi doivent l’apprendre : qu’il existe un plaisir à jouir de la beauté du monde sans en faire sa chose, sans chercher à en explorer, à en épuiser, à en exploiter la totalité ; qu’il existe un plaisir à maintenir et à savoir qu’existe un au-delà, un intouché, une place pour autre chose.
Je devais rendre prochainement mon mémoire, mon mémoire d’histoire, consacré à Jean Vilar. Mais mon Jean Vilar n’était pas l’homme de théâtre. C’était un politicien de la Troisième République, un homme en noir et blanc habillé d’un chapeau façon Joseph Caillaux.
Il y a une façon de rendre hommage aux gens, que nous pratiquons tous, je pense (du moins je sais que cela m’arrive) et qui est à la fois irritante et malvenue. C’est celle qui consiste à souligner non pas les qualités intrinsèques d’une personne ou de son œuvre mais la notoriété des hommes et des femmes qu’elle a côtoyées.
Qu’on porte plus d’attention aux victimes qui nous sont proches qu’à celles qui, à tort ou à raison, paraissent plus éloignées, c’est normal et sain. Mais qu’on oublie les victimes de l’autre camp, ou que, dans notre façon d’en parler, on manifeste qu’on les juge moins importantes, moins dignes d’attention, de respect ou de compassion que les autres, et on s’engage alors sur le chemin de la propagande, qui conduit au pire.
Pour voir, il faut déjà savoir, pour paraphraser Pascal (et peut-être aussi, disent certains, Rûmi, ou Augustin, ou peut-être les deux)
Quand vient l’hiver, nos nuits sont plus belles que nos jours, pour reprendre et décaler un peu ce beau vers de Racine évoquant les nuits de janvier à Uzès.
« Il y a une limite précise dans l’aide apportée aux autres. Au-delà de cette limite, invisible à beaucoup, il n’y a que volonté d’imposer sa propre façon d’être », observe Modesta, la libre et superbe héroïne de L’Art de la joie, de Goliarda Sapienza.
La femme de Montserrat, sculptée par Juli Gonzàlez, et qui hurle sa douleur, n’a ni camp ni patrie. C’est une paysanne catalane (mais elle pourrait être de partout), et on ne sait si elle a été victime des crimes fascistes dénoncés par Georges Bernanos ou des exactions républicaines dénoncées par Simone Weil. Et cela importe peu car cette femme, cette Pietà moderne, incarne, dans la souffrance de son cri, toute la douleur humaine, l’universelle et unique douleur humaine.
